Edito
On ne peut nier que l’Afrique est sans doute le continent qui a le plus influencé les autres en matière de musiques populaires. Par le truchement du blues et du jazz, la culture noire des descendants des esclaves issus du commerce triangulaire a essaimé partout sur la planète, rendant difficile la production d’une musique exempte de cette influence. On ne peut pas en dire autant des musiques populaires européennes (sauf peut-être la musique victorienne et les folk songs de Grande-Bretagne) et encore moins des musiques asiatiques (malgré une poussée, grâce à la musique issue des films du sous-continent indien). Si on s’intéresse aux musiciens qui excellent sur notre instrument, les Africains sont aussi de grands pourvoyeurs de talents. On pense évidemment à Richard Bona, mais d’autres avant lui ont fait le pas de venir à Paris pour faire carrière : Guy Nsangué, Étienne Mbappé, Linley Marthe... Car oui, à une époque, Paris était une plaque tournante de la musique mondiale. Mais voilà, on veut cloisonner, on veut contrôler et surtout on imagine que le salut viendra de la Start-up Nation et d’un techno-libéralisme qui ne sait vendre que des produits identifiés et formatés. Résultat, les musiciens du calibre de Bona vont jouer et vivre ailleurs et ceux qui tentent l’aventure française sont de moins en moins nombreux, préférant les États-Unis, qui gagnent une fois de plus la guerre culturelle (enfin ça, c’était avant Trump, mais on attend encore la prochaine révolution musicale venue du Deep South, Taylor Swift ça ne compte pas). L’Afrique, c’est aussi le Maghreb, qui est un gros pourvoyeur de musiciens étonnants et de rythmes nouveaux et où on a réussi à réinventer le blues, ainsi qu’une certaine utilisation de la guitare. Notre dossier sur la basse au Maroc va vous mettre à la page sur ce qu’il se passe dans ce pays magnifique en termes de musique. On voudrait nous faire croire qu’il n’est question que de vagues migratoires et d’échanges à sens unique. La planète n’a jamais été aussi petite, mais on n’a jamais autant mis de bâtons dans les roues de ceux qui essaient simplement de s’ouvrir au monde et tisser des liens qui ne passent pas par PayPal ou Google Pay. Si ce magazine peut servir à vous donner envie d’aller vers des musiques que vous n’auriez pas écoutées sinon, nous aurons réussi notre pari. Au menu de ce numéro, nos rubriques habituelles, notamment en pédago avec une sélection des meilleurs profs du moment, des tests d’instruments et aussi un petit guide d’achat pour Noël et se faire plaisir. Sinon, un abonnement, c’est pas mal non plus. Passez d’excellentes fêtes de fin d’année et rendez-vous en 2025 !
La rédaction
Numéro 113
7,90€